Ça m'a tourné la tête ! C'est ce que j'ai ressenti récemment lors du Congrès National de Philosophie du Droit et de Philosophie Sociale à l'Université de l'Atlantique (Universidad del Atlántico), un espace auquel ont participé les penseurs colombiens les plus renommés de notre temps, auquel j'ai eu l'honneur de parler en ouverture et dans lequel j'ai réaffirmé le caractère fondamental de la parole, de la philosophie et de l'autonomie des territoires dans la prise de décisions.
Je suis allé à ce congrès de philosophes pour parler de la parole en tant qu'élément qui donne en grande partie du sens à notre existence. À travers elle, on délibère et expose ses raisons, qui ne sont rien d'autre que la noblesse, l'honnêteté et la solidarité que nous portons tous. C'est pourquoi j'ai souligné l'importance de l'autonomie territoriale et son lien avec le respect et la paix.
Le territoire, conçu au-delà de son sens géographique et physique, permet de dialoguer sur le cadre dans lequel nous construisons notre monde et partageons notre existence. Je les ai invités à discuter du lien entre espace, histoire et pouvoir ; la vie publique, les traditions et enfin la culture pluraliste que nous avons et qui promeut la construction d'une société libre, démocratique et sans discriminations.
Je les ai invités à discuter du territoire en tant qu'espace de pouvoir politique et d'histoire partagée dans le cadre de la liberté politique. Compris dans une double facette : comme autonomie dans le langage de Benjamin Constant, Immanuel Kant, Norberto Bobbio et d'autres, et comme liberté de participation au gouvernement des affaires publiques que nous avons héritée de l'antiquité athénienne, enseignée par Clisthène, Solon, Périclès, et également défendue par Sophocle, Euripide, Eschyle.
Nous ne pouvons pas rester soumis à ce système centraliste
Ce dernier fait référence à la liberté comme autonomie territoriale, qui est le droit des citoyens des entités décentralisées de droit public d'exercer le gouvernement de leurs propres affaires : l'autogouvernement.
J'ai insisté pour discuter du droit à l'autonomie territoriale qui nous a été dépouillé par le centralisme politique notamment par la destruction de la souveraineté politique des États fédéraux, une liberté qui est inaliénable et imprescriptible. Le droit à la souveraineté est toujours dans l'esprit des peuples, méconnu par la Constitution de 1886.
Nous ne pouvons pas rester soumis à ce système centraliste archaïque qui renforce l'inégalité intrarégionale avec des mesures qui continuent à perpétuer, au niveau économique, un cas concret : la distribution inéquitable que fait le pouvoir central des Revenus Courants de la Nation (ICN), que nous produisons tous depuis des années.
L'augmentation des transferts des ICN atteint aujourd'hui seulement environ 20% à 22% pour les districts, municipalités et départements alors que la vision de la Constitution de 1991 est que la Nation et les territoires gèrent les ressources presque à parts égales. Mais, en raison de deux réformes constitutionnelles, cela n'a pas pu être réalisé, ce qui contribue à ce que la Colombie soit encore considérée comme l'un des pays les plus inégaux du monde, où peu de gens ont beaucoup et beaucoup gagnent peu, créant ainsi des problèmes sociaux difficiles à résoudre.
Pour des raisons telles que celle-ci, j'invite tous les Colombiens à délibérer sur l'organisation du pouvoir dans notre territoire afin d'enrichir la vie en liberté et de contribuer à la paix.