Le développement durable ne peut être atteint que par la combinaison du développement économique (y compris la fin de l'extrême pauvreté), de l'inclusion sociale, de la durabilité environnementale et de la bonne gouvernance (y compris la paix et la sécurité).
Nous sommes actuellement confrontés à des crises interconnectées de déclin de la nature, de changement climatique et de dégradation des sols, qui affectent la santé et le bien-être de l'homme. Les systèmes agroalimentaires sont désormais reconnus comme étant le principal moteur de l’érosion de la biodiversité dans le monde et comme contribuant à plus d'un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Dans le même temps, les systèmes agroalimentaires devront se préparer aux effets perturbateurs du changement climatique sur les chaînes de valeur de l'agriculture.
Ces systèmes doivent être réformés en combinant trois actions interdépendantes : modifier les habitudes alimentaires mondiales, protéger et réserver des terres pour la nature, et pratiquer une agriculture plus respectueuse de la nature et de la biodiversité. Les solutions agricoles fondées sur la nature (Ag-NBS) sont considérées comme une approche efficace, à long terme et rentable de la gestion durable des terres et des ressources en eau, de la baisse de la productivité agricole, de la pollution, de l'appauvrissement de la biodiversité et du changement climatique. Ces pratiques peuvent contribuer à améliorer la disponibilité et la qualité de l'eau ainsi qu'à restaurer les écosystèmes et les sols dans le monde entier, tout en offrant des avantages connexes considérables en matière de santé et de renforcement de la sécurité alimentaire mondiale. Elles peuvent donc contribuer à la mise en place de systèmes alimentaires plus sains, plus durables et plus résistants.
La préparation et le suivi du Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires de 2021 ont fait prendre conscience de la nécessité de transformer les systèmes alimentaires et de la possibilité d'accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l'horizon 20301. Ces stratégies peuvent en effet contribuer à la réalisation et à l'articulation de plusieurs, voire de la plupart, des Objectifs de développement durable (ODD)2 et nécessiteront un changement de gouvernance3 . Il faut pour cela une gouvernance à plusieurs niveaux qui garantisse une inclusion participative et fondée sur les droits, qui tire parti des connaissances locales et traditionnelles, et qui assure la représentation des peuples autochtones, des institutions locales, des femmes, des jeunes et d'autres groupes sous-représentés.
Ce constat a été suivi logiquement par le lancement de l'initiative de convergence sur l'action climatique et la transformation des systèmes alimentaires4 lors du sommet de la conférence des Nations unies sur le changement climatique de 2023 à Dubaï.
Les solutions basées sur le lieu sont donc essentielles pour transformer les systèmes alimentaires - le réseau complexe d'activités qui implique la production, la transformation, le transport et la consommation d'aliments - et libérer leur potentiel pour restaurer la biodiversité, limiter le changement climatique et fournir à chacun suffisamment d'aliments sains et nutritifs.
Mais l'établissement de frontières politiques et administratives a généralement ignoré les questions environnementales (voir la carte ci-dessous) et culturelles, et les solutions fondées sur la nature et le lieu ne peuvent pas être normalisées, appliquées et limitées à l'échelle nationale.
https://www.oneearth.org/bioregions-2023/
Si les approches territoriales du développement5 sont encouragées depuis des décennies, le rôle des villes et des gouvernements locaux est aujourd'hui de plus en plus reconnu dans un monde toujours plus urbanisé et touché par les crises. Les politiques de décentralisation sont essentielles pour soutenir la gouvernance infranationale, mais l'harmonisation intersectorielle et la planification conjointe devront être réalisées au niveau régional et municipal.
Mais les solutions fondées sur la nature ne peuvent se limiter à des perspectives nationales. Étant donné que les territoires ont des cultures alimentaires et des environnements physiques uniques, une approche biorégionale de la transformation des systèmes alimentaires serait plus logique et apporterait une valeur ajoutée à la politique et à la planification du développement durable, en termes de connaissances fondées sur la pratique, de collaboration entre les pays et de retour d'information au niveau mondial. Le renforcement de la résilience des systèmes alimentaires dans les « zones sensibles » transfrontalières serait particulièrement important pour la gestion des crises (y compris les conflits).
La convergence de l'eau, de l'action climatique et de la transformation des systèmes alimentaires ne peut plus être reportée si nous voulons un avenir équitable, inclusif et durable. Et les régions ont un rôle clé à jouer.
[1] https://sdgs.un.org/2030agenda
[2] https://sdgs.un.org/es/goals
[3] Policy Brief – Governance for Food Systems Transformation https://www.unfoodsystemshub.org/docs/unfoodsystemslibraries/fss-community/chapter-2/policybrief_governanceunfss.pdf?sfvrsn=edae3afc_
[4] CoP 28 UAE Declaration on Sustainable Agriculture, Resilient Food Systems and Climate Action https://www.cop28.com/en/food-and-agriculture
[5] https://www.donorplatform.org/post/tp4d-territorial-approaches-for-sustainable-development/